Les jeunes de la Briqueterie s’organisent pour assainir leur quartier

Ils se sont regroupés en comité et grâce à leurs efforts, le quartier dispose déjà d’adductions en eau potable et de toilettes publiques.

 Anne Mireille Nzouankeu
Douala, Cameroun

Comme tous les mercredis, Ousseini Mongbet et d’autres habitants du quartier Briqueterie nettoient leur quartier. Cette fois-ci, ils ont décidé de supprimer une décharge publique spontanée qui s’est créée non loin du lieu dit « Cinéma Rex ». Munis de pelles, de râteaux, de bottes et de cache-nez, ces jeunes, réunis au sein du  Comité d’action et de développement du quartier Briqueterie (Cad), mettront finalement près de trois heures avant d’avoir fini de tout nettoyer.

Nettoyage du quartier par membres du  CAD

Nettoyage du quartier par membres du CAD

« L’objectif de l’association est de servir de relais entre la population et les autorités administratives, notamment la commune. Nous recensons les problèmes du quartier, nous les classons par priorité et les soumettons à la mairie et à d’autres partenaires financiers qui nous aident à trouver des solutions », explique Laure Rikong la présidente du Comité d’action et de développement du quartier Briqueterie.

Insalubrité

Jusque là, le quartier Briqueterie était connu comme l’un des plus grands bidonvilles de Yaoundé, avec un taux très élevé d’insalubrité. Situé en plein cœur de la capitale politique du Cameroun,  la population, très pauvre, a considérablement augmenté sans que l’urbanisation ne suive. “La vie est très difficile ici. Le quartier a été construit de manière anarchique, avec des maisons en matériaux provisoires, sans commodités telles que les toilettes par exemple. Parfois il faut même passer dans la cour du voisin du arriver chez soi. Mais je dois avouer que l’allure générale du quartier est en nette amélioration », reconnait Issa Balamba, un jeune du quartier.

Campagne de sensibilisation de maison en maison

Campagne de sensibilisation de maison en maison

C’est pour casser cette image négative que le Cad a pris les choses en main en initiant des actions d’hygiène et de salubrité. Les activités des 27 membres du Cad sont assez variées : les causeries éducatives avec la population, la participation aux grandes campagnes nationales telles que celles de distribution gratuite des moustiquaires imprégnées à longue durée d’action, la sensibilisation sur le lavage des mains à l’eau potable et au savon, l’entretien des puits, le traitement des points d’eau…etc. « Après plusieurs campagnes de sensibilisation des populations sur le paludisme et des distributions des moustiquaires imprégnées à longue durée d’action, il y a eu une baisse significative des cas de paludisme », indique le rapport d’activités 2012 du Cad.

Toilettes publiques

Dans ce quartier, on constate cependant que les actions du Cad ne sont pas toujours suivies par le reste de la population. Adja, mère de six enfants vit dans ce quartier depuis moins d’un an. Venue de la partie septentrionale du pays, elle dit avoir perdu deux membres de sa famille des suites de choléra.  Comme plusieurs habitants du quartier, elle apprécie l’action des membres du Cad mais malheureusement, n’y prend pas part. Pour accéder à son domicile situé en face du cinéma Rex, on longe un couloir à coté duquel s’écoulent des eaux usées. Ces eaux sont un mélange de déchets ménagers qui dégagent une odeur d’œufs pourris. La maison d’Adja, comme celle de la plupart des habitations du quartier n’est pas pourvue d’eau potable. Elle doit s’approvisionner dans un puits d’eau creusé derrière la maison, près d’un trou qui sert de latrines.

Nettoyage de quartier Briqueterie par membres du CAD

Nettoyage de quartier Briqueterie par membres du CAD

“L’absence de toilettes dans les domiciles est à l’origine de plusieurs comportements déviants. Il y a des gens qui urinent sur les abords de la route ou dans les cours d’eau. De plus, il n’y a pas d’eau potable, les gens consomment l’eau des cours d’eau, une eau déjà souillée par les selles. C’est pourquoi, il y avait jusque là un fort taux de maladies d’origine hydrique”, confie Ousseini Mongbet, qui est aussi le président du Comité de santé du quartier (Cosa).

C’est fort de ce constat que ce groupe de jeunes a obtenu des financements pour la construction de cinq bornes fontaines publiques dans le quartier. Deux ont été construites en 2008 et les trois autres en 2010. Trois toilettes publiques et une douche ont également été construites. “Ce n’est qu’un début. Nous cherchons des financements pour aménager d’autres toilettes près des domiciles afin qu’il y ait au moins une toilette pour trois à cinq maisons,” dit Ousseini Mongbet.

Pour tout projet de développement, la population contribue à hauteur de 20% du montant global du projet, la commune apporte  20% et le partenaire financier, 60%. Grâce au dynamisme de ces jeunes, le quartier a également pu bénéficier de distributions gratuites de moustiquaires ainsi que de nombreuses campagnes d’assainissement et de sensibilisation pour enrayer le choléra. Le taux de prévalence des maladies d’origine hydrique est passé de “95% en mai 2010 à 60% en février 2012″, d’après le rapport d’activités du comité de santé du quartier.

“Les jeunes doivent prendre leur destin en main. Nous ne devons pas toujours attendre que l’Etat fasse tout pour nous. Avec de petits moyens, nous pouvons considérablement améliorer notre milieu de vie”, dit Laure Rikong.


 

 

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