Douala : tension entre des centrafricains et des camerounais

Des camerounais soupçonnent ces étrangers d’être complices de la disparition de deux enfants au quartier Newtown aéroport 5.

Josiane Kouagheu,
Douala-Cameroun  

Débout devant une maison construite en planches au quartier Newtown aéroport 5 à Douala, deux jeunes hommes bavardent. « Ils ont dit qu’ils n’allaient plus revenir ici. Nos frères veulent aller n’importe où, en dehors de Bangui. Ils ont des blessures sur le corps. Ils sont allés samedi (24 mai 2014 ndlr) au Hcr pour se protéger », lance l’un. Les deux jeunes hommes se taisent à l’approche du reporter. Après plusieurs minutes de discussion, l’un d’eux consent à nous parler. Abdou, réfugié centrafricain installé dans le quartier depuis le mois de janvier 2014, explique que des camerounais avec qui ils vivaient « dans la paix depuis plusieurs mois » sont entrés dans leurs et les ont bastonnés vendredi 23 mai 2014. Abdou précise que les jeunes camerounais étaient munis des gourdins. « Pour se protéger, des centrafricains se sont réfugiés dans une église », explique Prince Benoît Noubissie, chef traditionnel du 3ème degré du quartier Newtown aéroport 5.

Tout part de la disparition de deux petits garçons camerounais âgés de 4 ans. Les parents remarquent l’absence des enfants mercredi 21 mai 2014. Des voisins soupçonnent aussitôt une jeune femme d’origine centrafricaine. D’après Prince Benoît Noubissie, des camerounais sont allés dans le domicile de la femme dans la soirée de jeudi 22 mai. « Je n’étais pas là. Mon fils m’a expliqué qu’ils ont amené la femme nue à la chefferie. Des habitants voulaient en découdre avec elle. Ce sont des jeunes du comité de vigilance du quartier qui ont réussi à la mettre à l’abri dans ma maison », raconte Prince Benoît Noubissie. Les éléments de la Direction régionale de la police judiciaire (Drpj) du Littoral descendus sur les lieux le même jeudi ont interpellé la jeune centrafricaine. Elle y est gardée à vue.

Le consulat de Rca réagit

« Ce jeudi-là, ils ont saccagé ma maison car la femme s’était réfugiée chez moi. Ils l’ont arrêtée. Ils voulaient me bastonner. Vendredi, ils sont revenus pour nous bastonner. J’ai réussi à m’enfuir pour me refugier à notre consulat à Douala, d’autres se sont réfugiés dans une église au quartier », précise Francis Dobe, un réfugié centrafricain. Le lendemain samedi, les deux enfants ont été retrouvés. Ils ont été conduits à la chefferie. Mais, jusque-là, des habitants n’étaient pas apaisés. Le chef du quartier explique que certaines personnes, malgré la vue des deux enfants retrouvés, ont continué à s’en prendre aux centrafricains. Il a fallu l’intervention des policiers du commissariat de sécurité publique du 8ème arrondissement de Douala pour calmer la foule. Prince Benoît Noubissie affirme que les policiers ont dû tirer des coups de feu en l’air pour disperser la population.
« L’incident était tel que le consulat nous a envoyé deux émissaires pour s’enquérir de la situation. Heureusement que tout est revenu dans l’ordre.

Depuis hier, je fais des tournées dans le quartier pour sensibiliser mes frères camerounais et centrafricains », affirme le chef du quartier Newtown aéroport 5. Pour éviter que des incidents pareils ne se reproduisent plus, une opération d’identification des réfugiés centrafricains a débuté depuis dimanche 25 mai dans le quartier. Prince Benoît Noubissie compte organiser des réunions avec sa population, des responsables d’association et des centrafricains pour leur expliquer l’importance du « vivre ensemble ». « Les centrafricains sont nos frères. Nous ne savons pas ce qui va nous arriver demain. Il faut promouvoir la non violence », souligne Joseph Ferdinand Ngueumelieu, vice-président de l’association des hommes du bloc 6 du quartier Newtown aéroport 5.

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